1. La résurrection de Jésus
Le matin du premier jour de la semaine, après le repos du samedi, règne à Jérusalem une extraordinaire activité. Tout à coup le paysage s’anime. Des femmes se rendent au tombeau pour aller embaumer le corps de Jésus, mais celui-ci a disparu. Peu de temps après, Jésus se montre à deux d’entre elles, puis à deux disciples sur la route d’Emmaüs et ensuite aux apôtres, à plusieurs reprises. Et Paul écrit même aux Corinthiens qu’il est apparu à plus de 500 frères à la fois (1 Corinthiens 15, 6).
Quatre témoins
Un événement extraordinaire s’est donc produit. Des témoins d’abord incrédules l’ont reconnu. Nous avons 4 Évangiles et donc 4 regards différents. Que nous disent, chacun des Évangiles, sur la résurrection du Christ ?
L'événement-résurrection n’est jamais décrit. Il n’y a pas de reconstitution des faits, de réponse à un comment. Les évangélistes ne rapportent pas ce qui s’est passé dans le tombeau quand Jésus a été réveillé d’entre les morts. Seul importe l’après résurrection et tout spécialement le témoignage des femmes. Ces témoignages se ressemblent et diffèrent beaucoup : pas question d’harmoniser les quatre récits.
Marc
Marc multiplie les détails pour mettre en relief l’inattendu. La pierre est roulée et les femmes sont saisies par la crainte en voyant un jeune homme en blanc. Il leur dit : « Il a été réveillé, il n’est pas ici » La place qu’il occupe et sa jeunesse les empêchent de le prendre pour Jésus. Mais il s’agit bien de Jésus le Nazaréen, le crucifié. La robe blanche est le signe d’un personnage céleste comme dans le livre de Daniel (Daniel 10, 5) Derrière l’apparence des évènements se révèle l’accomplissement du dessein de Dieu : il n’a pas été enlevé, il a été réveillé. Dieu est intervenu. L’appel à la confiance signe aussi l’origine divine de l’intervention. Maintenant tout commence : « Dites à ses disciples qu’il reprend votre tête en Galilée » Le ressuscité reprend la tête du troupeau, précisément en Galilée, là où tout a commencé.
Matthieu
Matthieu diffère de Marc. Les femmes se demandent qui leur roulera la pierre pour aller embaumer le corps. Nous ne lisons pas la révélation d’un ange messager, mais une glorieuse manifestation divine. Ce n’est plus un jeune homme mais l’Ange du Seigneur, véritable substitut de Dieu dans ses interventions terrestres. « Il y eut un grand séisme ». L’Ange du Seigneur descend du ciel, roule la pierre et s’assoit dessus. On avait voulu enfermer Jésus dans la mort mais l’initiative même de Dieu ouvre le Schéol, le séjour des morts, en même temps que la pierre du tombeau est roulée. Le royaume de la mort a perdu son pouvoir. Les chefs essaient, à coup de pots de vin, de monter la fable de l’enlèvement, mais cela ne sert à rien. Dieu est vainqueur. Matthieu reprend les mêmes expressions de Marc pour révéler la signification de l'événement. Cessez de craindre, il a été réveillé comme il l’a dit. Les gardes sont, eux, comme morts. Matthieu reprend le message de Marc « Il reprend votre tête en Galilée », mais charge les femmes d’annoncer le réveil : « Allez dire aux disciples qu’il a été réveillé de la mort. » L’Ange du Seigneur, Dieu lui-même, annonce ces choses. C’est la visite de Dieu à son peuple, le jour du Seigneur.
Luc
Luc s’écarte de Marc encore plus que Matthieu. Il garde les détails, mais accorde plus d’attention à l’évolution psychologique des femmes et à leur perplexité. « Elles étaient perplexes à ce sujet » Elles sont saisies par la crainte, inclinent leurs visages vers la terre. Luc fait intervenir deux hommes en habits resplendissants. Ces personnages célestes témoignent du réveil de Jésus. Puisque, selon la règle traditionnelle (Deutéronome 19, 15), il faut deux personnes pour qu’un témoignage soit reçu. Jésus n’est pas nommé, il n’est pas appelé le crucifié mais le Vivant pour lui donner sa pleine dimension divine. C’est la dénomination de Dieu dans l’Ancien Testament. Le témoignage des deux hommes se fonde sur les paroles de Jésus « Le Fils de l’homme doit être livré aux mains des pécheurs, être crucifié et ressusciter le troisième jour » Luc se réfère aux paroles prophétiques de Jésus qui, de son vivant, avait déjà annoncé ce qui allait lui arriver. Les disciples ne croient pas les femmes. Il n’est pas question d’un rendez-vous galiléen mais de ce que Jésus a dit encore en Galilée. Les apparitions de Jésus ont lieu exclusivement à Jérusalem et dans les environs. Luc insiste sur l’importance du témoignage à rendre à la résurrection, au témoignage des annonces prophétiques de Jésus lui-même.
Jean
Jean, braque d’abord le projecteur sur Marie de Magdala qui constate que la pierre a été enlevée et court prévenir les disciples de la disparition du Seigneur. Pierre et Jean courent au tombeau. Pierre ne tire de sa visite qu’un profond étonnement. Il ne comprend pas et ne parvient pas à croire. Quant au disciple bien-aimé, « il vit et il crut ». Quelle est la source de sa foi ? Il a vu les linges, les décrit avec force détails et il croit à la vue de leur disposition. Aucune manipulation n’a dérangé leur agencement. Le corps s’est comme évanoui ou volatilisé. Un rapt ou une intervention humaine quelconque n'eût pas laissé les linges en l’état. Seule la résurrection peut rendre compte de ce fait. Le disciple bien-aimé accède à la foi en la résurrection sur un indice matériel. Ce n’est pas l’aboutissement d’un raisonnement humain, mais le fruit d’une révélation intérieure promise par Jésus à ceux qui gardent sa parole. « Celui qui m’aime sera aimé de mon Père, je l’aimerai et me manifesterai à lui » (Jean 14, 21) Pour croire, il faut cette qualité du cœur fidèle et aimant. Il s’agit toujours d’un discours qui va de la foi à la foi : de la foi des disciples, si heureusement longue à naître, à la foi de ceux qui n’ont pas vu.
Ouvrons les perspectives...
Jésus vivant, hors du tombeau, n’est pas une image originale pour illustrer une pensée banale du genre : « Jésus vivra éternellement dans nos mémoires et l’idéal qu’il nous a présenté nous concerne toujours et peut encore changer nos vies ».
Il est ressuscité : cela signifie que la puissance du Dieu d’amour, du Père de Jésus-Christ, s’est déchaînée et que ce cadavre exposé à la putréfaction est redevenu un corps vivant, le même corps du même Jésus, vivant et bien vivant. « Il est ressuscité, il est vraiment ressuscité. » comme nous disons à Pâques.
Cet événement fonde, contient et résume toute la foi chrétienne. Sans résurrection « mangeons et buvons, car bientôt nous mourrons » écrit saint Paul. Mais oui, le Christ est ressuscité, réjouissons-nous, car nous sommes sauvés, si nous y croyons.
Avoir foi en la résurrection de Jésus, ce n’est pas se décider en fonction d’un sentiment intérieur et sans raison ; c’est ajouter foi à des témoignages parce qu’on voit qu’ils sont recevables. Et nous aujourd’hui? Vivons-nous vraiment de ces témoignages et comment sommes-nous témoins de la résurrection aujourd’hui ?
frère Yves Habert
Le frère Yves Habert est responsable de Retraite dans la Ville. Après avoir été prieur du couvent de Rennes, il est prieur du couvent de Lille depuis 2019. Il a publié "Paul Claudel regarde la croix", chez Parole et Silences, en 2003 et "Prier 15 jours avec Paul Claudel", chez Nouvelle Citée, en 2005.
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