2. Le shabbat
Quand on pense au shabbat, dans le judaïsme, on pense à “ne rien faire”. La racine a donné naissance à de nombreux autres mots en hébreu moderne : faire la “SHeBiTa”, c’est faire la grève ! c’est s’arrêter de travailler. Alors, le samedi, on se tourne les pouces ?
Se souvenir du repos de la Création
Le récit biblique nous dit bien que Dieu “arrêta toute l'œuvre que lui-même avait créée”: le verbe est bien “arrêter” mais pour autant Dieu ne se tourne pas les pouces.
Le récit nous dit aussi qu’en ce jour, Dieu a tout achevé, c’est-à-dire a tout mené à sa perfection et surtout que Dieu “sanctifia” ce jour, lui donna un caractère sacré. Dans la pensée biblique juive, être sacré, c’est être “mis à part”. C’est donc un jour saint donc à part.
Et pourquoi l’homme, lui aussi, doit-il arrêter toute activité de création? Pour célébrer la Création, première alliance de Dieu avec les hommes, et contempler la beauté de cette dernière.
Ainsi donc, le Shabbat, on s'arrête de travailler pour se souvenir de l'Alliance. Le peuple qui garde le shabbat est à son tour un peuple qui devient saint.
« Vous observerez bien mes sabbats, car ce sera entre moi et vous, au fil des générations, un signe auquel on reconnaîtra que je suis l’Eternel qui vous considère comme saints. Vous respecterez le sabbat, car il est saint pour vous. » (Exode 31, 13–14)
Le shabbat, une expérience de libération
Mais l’homme pécha, mit fin à cet éternel repos contemplatif du shabbat, celui du Paradis. Adam et Eve furent expulsés du repos paradisiaque et durent tout faire à la sueur de leur front, furent réduits en esclavage en Egypte.
Dieu décida alors de leur faire faire l’expérience du repos en les libérant du travail forcé et de l’esclavage. Dieu fit sortir son peuple d’Égypte grâce à Moïse et leur redonna le shabbat, ce jour du repos, sur le Mont Sinaï.
Pendant ce jour du shabbat, on se souvient de la libération, du salut et de la Rédemption que Dieu a accomplis en faveur de son peuple :
« Mais le septième jour est le jour du repos de l’Éternel, ton Dieu. Tu ne feras aucun travail, ni toi, ni ton fils, ni ta fille, ni ton esclave, ni ta servante, ni ton bœuf, ni ton âne, ni aucune de tes bêtes, ni l’étranger qui habite chez toi, afin que ton esclave et ta servante se reposent comme toi. Tu te souviendras que tu as été esclave en Egypte et que l’Eternel, ton Dieu, t’en a fait sortir avec puissance et force. » (Deutéronome 5, 12–15)
De même, tous les 7 ans, on doit laisser la terre se reposer, la laisser en jachère. Tous les 7 fois 7 ans, c’est-à-dire tous les 50 ans, c’est l’année du jubilé où les terres sont redistribuées.
Ce jour de shabbat est donc celui de la célébration de la Création et de la célébration de la Rédemption. Un jour de joie et de délices:
« (...) si tu considères le sabbat comme un plaisir, le jour saint de l’Éternel comme digne d’être honoré, et si tu l’honores en ne suivant pas tes voies habituelles, (...) alors tu trouveras ton plaisir dans l’Eternel. » (Isaïe 58,13–14).
Le Shabbat, espace de temps rempli par la présence de Dieu, communique la vie de Dieu à qui le pratique. Dieu veut redonner ce repos de la Création aux hommes qui l’ont perdu, toute l’entreprise divine est de nous remettre dans l’état de la Création, avant le péché, ce péché qui défigure l’homme.
Et le dimanche ? nouveau shabbat ?
Jésus a commencé sa mission à la synagogue de Nazareth un shabbat pour annoncer une nouvelle ère de repos en Dieu. Plusieurs fois, les évangiles nous montrent Jésus qui renouvelle le sens du shabbat: Jésus est le maître du shabbat, c’est-à-dire que lui seul peut réellement rétablir l’ordre premier de la Création, nous ramener au repos perdu par le péché. Mais Jésus va encore plus loin…
Pendant le samedi saint, jour de shabbat, Jésus est au tombeau, recrée patiemment le monde et il sort de la tombe le dimanche, le 8ème jour, le jour de la Création nouvelle.
Le dimanche est le huitième jour, le jour du Messie : à la fois dernier jour de la semaine et premier jour de la semaine, il montre que nous vivons dans un temps nouveau : il annonce une fin définitive du temps. Nous en avons déjà l’avant-goût aujourd’hui et maintenant.
Ne pas travailler le dimanche, respecter un nécessaire arrêt du travail, c’est se rappeler que nous sommes appelés à nous souvenir de la Création, du Salut offert à Israël et de son accomplissement dans Jésus-Christ par sa Résurrection.
Nous avons besoin de ce jour spécial pour célébrer cette vie donnée en abondance par Dieu comme signe de sa sainteté mais aussi de la nôtre. Le dimanche nous rappelle ainsi que nous ne sommes pas esclaves du temps mais que c’est dans ce temps que nous sommes appelés à la vie, au salut, au vrai repos, ce vrai repos qui nous avait été donné au Paradis, lors de la Création.
Pour aller plus loin, vous pouvez suivre le cours de François Jorel sur la Genèse, sur Domuni, l’Université Dominicaine en ligne.
frère Olivier Catel
En 2021, frère Olivier Catel vit, prie et étudie au couvent dominicain de Jérusalem. Il travaille sur les textes hébreux du début de l'ère chrétienne. Il est agrégé de lettres et a publié sa thèse de lettres modernes : "Peinture et esthétique religieuse dans l’œuvre de Chateaubriand" (Champion, 2016).
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