3. Croire pour connaître Dieu
Frère David penché sur une carte, avec à ses côtés un sac à dos, une boussole...
Voix off - Frère David ?
Frère David - Oui ?
Voix off - Qu’est-ce que tu fais ?
Frère David - Tu vois bien ! J’étudie une carte !
Voix off - Pourquoi ?
Fr. David - Parce que je cherche Dieu et qu’il y a plusieurs chemins possibles pour le rejoindre ! Tu comprends ?
Voix off - Pas tout à fait !
Fr. David - Je vais t’expliquer !
Fr. David - Il y a des pays, tu vois, que l’on connaît bien, parce qu’on y habite et des pays que l’on ne connaît pas, mais dont on a entendu parler et que l’on a envie de découvrir à son tour ! Dieu, c’est un peu cela.
Je n’ai eu connaissance de Lui et de son Royaume que par ouï-dire. Mais j’ai fait confiance à ceux qui l’ont vu et qui l’ont entendu. Je les ai crus sur parole ! Cette parole qu’ils ont écrite dans cette bibliothèque portative qu’on appelle la Bible !
Voix off - Si je comprends bien, la Bible, c’est pour toi comme une carte qui mène à Dieu !
Frère David - Oui, exactement, pour connaître Dieu et ses mystères, il n’y a pas mieux! Parce qu’en vérité, c’est Dieu lui-même qui est l’auteur de cette carte. C’est lui qui l’a dessinée ! Il s’est révélé à nous. Toutes les phrases, les histoires, les réflexions, les témoignages qui sont donnés dans ce livre, ont été inspirés par lui. Ce sont des hommes qui ont écrit mais Dieu leur a soufflé leurs idées ! Il leur a fait connaître qui Il était et ce qu’Il voulait pour nous les hommes.
Voix off - Mais c’est pas facile de lire une carte. On peut se tromper de sens, par exemple, ou ne pas réussir à interpréter les symboles !
Frère David - La première chose que tu dois avoir en voyage, c’est une bonne lampe ! C’est pareil pour les Écritures. Pour pouvoir les interpréter, il faut avoir la lampe à huile donnée par Dieu : la lumière de la foi.
Cette lumière ne s’achète pas mais se reçoit gratuitement et principalement dans les sacrements, en premier lieu le baptême qui est la porte de la foi. Avec cette lumière, tu peux lire la carte que Dieu a tracée. Mais ce n’est pas tout ! Il faut une deuxième chose : la Tradition. La Tradition, en gros, c’est ce qui t’empêche de partir dans le décor. C’est cet accord unanime des chrétiens, de tout temps et en tout lieu, concernant l’interprétation des Écritures. L’Écriture lue dans la Tradition de l’Église est donc la voie royale, la voie parfaite pour aller vers Dieu.
Voix off - Si je résume, pour cheminer vers Dieu, il faut
1) la Lumière de la foi pour lire
2) l’Écriture
3) dans la Tradition.
Frère David - Sans elles, en effet, il est impossible de comprendre les Écritures, de croire, par exemple, que Dieu est Père, Fils et Saint-Esprit, que la deuxième personne de la Trinité, le Fils, s’est fait homme, que nous sommes tous appelés à vivre, dès maintenant, la vie même de Dieu ou bien encore que l’Église catholique possède tous les moyens pour nous sauver.
Voix off - Et les hommes qui n’ont pas la foi, alors ? Comment font-ils pour aller vers Dieu ? Ils sont perdus ?
Frère David - Quand tu n’as pas de carte et pas de lumière, que tu n’as ni la Bible, ni la Foi et que tu n’es pas orienté par l’Église, tu es laissé à tes propres forces, « au milieu d’une forêt obscure », comme dirait le poète italien Dante. Tu n’as pas les moyens d’aller très loin et de marcher avec assurance !
Mais tout n’est pas perdu ! Car tu as une sorte de boussole ou de GPS intérieur qui peut, quand même, te mettre sur la voie de Dieu : ta raison !
Grâce à elle, tu n’es pas complètement désorienté. Souviens-toi de ce que dit le livre de la Genèse : « Dieu a fait l’homme à son image et ressemblance ». Dieu a donné à l’homme un esprit, une raison, qui ressemble un petit peu (un tout petit peu) à son propre esprit. Par sa raison, l’homme peut connaître quelques vérités sur Dieu. À condition, toutefois, qu’il fasse l’effort de le chercher et de ne pas recouvrir cette lumière intérieure par tout un tas de choses qui finissent par l’éteindre !
Voix off - Mais si l’homme n’a d’autre guide que les lumières naturelles de sa raison, que peut-il savoir concrètement de Dieu ? Puisqu’il ne le voit pas.
Frère David - Dieu n’est pas visible puisqu’Il est Esprit. Mais Il est visible indirectement : dans ses oeuvres. En regardant attentivement tout ce qui nous entoure — la nature, en général, la personne humaine, en particulier — et en cherchant la cause de tout cela, nous pouvons, par un raisonnement, remonter à celui qui a causé tout cela et que l’on peut appeler Dieu. Dieu est la cause et ce qui existe sont ses effets. À partir des effets, on peut connaître, de quelque manière, la cause. Dieu imprime sa marque dans la création. En cherchant les raisons des choses, notre intelligence peut remonter la piste et découvrir le pot-aux-roses : Dieu. C’est ce que disait l’auteur du livre de la Sagesse : « La grandeur et la beauté des créatures font, par analogie, contempler leur Auteur. » (Sagesse 13, 1-5)
Voix off - Ah oui ! C’est ce que l’on appelle les preuves ou les voies de l’existence de Dieu ! S’inspirant d’Aristote, saint Thomas d’Aquin a fait remarquer, par exemple, que le monde est sans cesse en mouvement, sans cesse en devenir, toujours en train de « bouger ». Chaque mouvement a une cause mais on ne peut remonter comme cela, à l’infini, dans la chaîne des causes, si bien qu’en définitive, il est nécessaire de postuler l’existence d’un premier « moteur » à l’origine de tout, une cause motrice qu’on appelle Dieu.
Frère David - Exactement, l’intelligence humaine, par ses seules forces naturelles, peut arriver à « capter » par d’autres raisonnements de ce genre que Dieu existe et qu’il est principe et fin de toute chose. C’est ce que dit le concile Vatican I en 1870 :
voix off - « Notre Mère la Sainte Église croit et enseigne que Dieu, principe et fin de toute chose, peut être connu avec certitude à la lumière naturelle de la raison humaine au moyen des créatures ; en effet ce qui de lui ne se voit pas peut, depuis la création du monde, être contemplé grâce à ces œuvres (Romains 1, 20). »
Frère David - Il faut reconnaître cependant que cette connaissance naturelle de Dieu est
1) partielle parce qu’elle ne nous fait pas connaître les vérités qui sauvent (le kerygme)
voix off - pardon ?
Frère David - Bon, en gros, “Jésus t’aime”
2) Et cette connaissance naturelle de Dieu est imparfaite. Elle doit être soutenue, enrichie, complétée, perfectionnée, par la connaissance surnaturelle qui s’appuie sur la Révélation et s’obtient par la grâce.
Voix off - Les chemins de la raison et de la foi ne s’opposent donc pas !
Frère David - En effet ! D’abord parce que nous n’avons pas deux intelligences, l’une qui raisonne, l’autre qui croit, mais une seule et même intelligence qui cherche et qui croit. Ensuite parce que la science apporte, dans son domaine, des informations dont l’intelligence, éclairée par la grâce de la foi, peut s’emparer. La Révélation consignée dans la Bible apporte de son côté, à l’homme, des lumières sur Dieu, qui sont de soi inaccessibles à la raison. En bref : tous les chemins mènent à Rome, c’est-à-dire à Dieu !
frère David Perrin
Avant d'entrer dans l'Ordre Dominicain, frère David étudiait la littérature française. En 2020, il est directeur du studium de philosophie de Bordeaux. Il y enseigne, entre autres, l'anthropologie et la philosophie de l'art. Il a publié sa thèse : "Jean Giono, itinéraire d'un homme sans Dieu" (Classique Garnier, 2021)
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