5. Apocalypse 6 à 11 : catastrophes en série
Nous allons enfin pouvoir ouvrir le livre scellé de 7 sceaux et savoir ce qu’il révèle !
Voix – off : Les 4 premiers sceaux sont ouverts ! Voici les 4 cavaliers de l’Apocalypse : la victoire, la guerre, la famine et la peste ! 5e sceau : les âmes des martyrs crient vengeance ! 6e sceau : la terre est ébranlée, les étoiles tombent, le ciel est replié comme un livre !
Euh… Vous êtes sûr de vouloir ouvrir le livre… ?
C’est bien beau de rappeler que « Apocalypse » ne signifie pas « fin du monde », mais « révélation », « dévoilement », pourtant il faut bien admettre que le livre de l’Apocalypse est plein de cataclysmes.
Un rythme à 7 temps
Avant de plonger dans le texte et voir ce que peuvent signifier ces cataclysmes, prenons le temps de regarder le plan. Si on survole le plan, on retrouve plusieurs fois dans le livre une sorte de compte à rebours. Dans un décompte à 7 numéros, les catastrophes s’enchaînent et s’amplifient, annonçant la fin. Il y a d’abord les 7 sceaux du livre qui sont ouverts, puis les 7 trompettes sonnées par des anges, enfin les 7 coupes déversées sur la terre.
Une première chose que nous pouvons remarquer, c’est le rythme de chacun de ces comptes à rebours. Les premiers éléments s’enchaînent très vite, puis le texte commence à traîner, s’attardant généralement sur l’avant-dernier élément. Ça fait : 1, 2, 3, 4, 5 …, 6 … … … et 7 ! Par exemple, entre la 6e et la 7e trompette, se déroulent plus de 2 chapitres ! Autant dire que lorsqu’on nous annonce la sonnerie de la 7e trompette, on avait même oublié qu’il en restait encore une qui devait sonner !
Ce rythme, faussement chronologique, crée un effet puissant d’attente et de suspens. On a toujours l’impression d’être à l’avant dernière étape, que le dernier saut est imminent et pourtant… il n’arrive jamais !
Un enchaînement sans pause
Un autre effet vient encore renforcer cette impression de fin qui n’en finit jamais : aussitôt une série finie, une autre recommence ! C’est particulièrement vrai avec l’enchaînement des sceaux et des trompettes au début du chapitre 8 :
« Quand il [l’agneau] ouvrit le septième sceau, il y eut dans le ciel un silence d’environ une demi-heure. Et j’ai vu les sept anges qui se tiennent devant Dieu : il leur fut donné sept trompettes. » (Apocalypse 8, 1-2)
On est à peine remis de l’attente du 7e sceau que voici les 7 trompettes et c’est reparti ! C’est comme d’ouvrir des poupées russes, c’est sans fin ! C’est d’ailleurs probablement l’effet recherché par le livre : rendre compte en même temps du salut qui est sur le point d’arriver et pourtant de cette attente, qui dure douloureusement. D’un côté nous avons toujours l’impression que nous sommes à l’avant dernière heure, que le Seigneur tarde à venir, et d’un autre ces événements en cascades nous montrent que Dieu ne reste pas inactif, le salut est en cours !
Pourquoi des catastrophes ?
Mais vous allez me demander pourquoi faut-il que le salut en cours se manifeste par des catastrophes ? Pour répondre à cette question, il faut plonger dans le texte. Prenons par exemple l’ouverture du 6e sceau :
« Alors j’ai vu : quand il [l’agneau] ouvrit le sixième sceau, il y eut un grand tremblement de terre, le soleil devint noir comme une étoffe de crin, et la lune entière, comme du sang, et les étoiles du ciel tombèrent sur la terre comme lorsqu’un figuier secoué par un grand vent jette ses fruits. Le ciel se retira comme un livre qu’on referme ; toutes les montagnes et les îles furent déplacées. Les rois de la terre et les grands, les chefs d’armée, les riches et les puissants, tous les esclaves et les hommes libres allèrent se cacher dans les cavernes et les rochers des montagnes. » (Apocalypse 6, 12-15)
Spontanément, face à une telle description, des images de catastrophes humanitaires nous viennent en tête et les habituelles questions « Comment Dieu peut-il permettre cela ? » nous assaillent. Mais ce n’est pas du tout la réaction des habitants de la terre que décrit l’Apocalypse, au contraire :
« Et ils disaient aux montagnes et aux rochers : “Tombez sur nous, et cachez nous du regard de celui qui siège sur le Trône (…) ” »
Étonnamment, les habitants de la terre ne tremblent pas tant devant la nature déchaînée que devant Celui qui la met dans cet état !
La Création et son Créateur
Si nous ne comprenons pas, c’est parce que nous ne sommes pas assez familiers des Écritures ! Dans l’Ancien Testament, les cataclysmes naturels ne sont pas tant perçus comme des catastrophes humanitaires mais comme des signes que la création tremble devant son créateur. Comme le dit très bien un psaume :
« Les montagnes fondent comme cire devant le Seigneur, devant le Maître de toute la terre. » (Psaume 96-97, 5)
La plupart des bouleversements cosmiques décrits dans l’Apocalypse ne sont donc pas des punitions mais des signes « théophaniques », c’est-à-dire qu’ils ont pour but de manifester la présence du Dieu tout-puissant devant qui tremble la création tout entière ! « A quoi bon tant de terreur ? » me direz-vous ! Eh bien à rappeler aux hommes, particulièrement aux plus méchants qui se croient tout permis, cette présence divine, qu’ils ont terriblement tendance à oublier.
Ainsi les catastrophes en cascade du livre de l’Apocalypse, sous leur aspect terrible, sont autant d’appels à la conversion : le temps est proche, déjà la création montre des signes de sa fragilité, il est temps de revenir au Seigneur qui seul dure éternellement !
frère Pierre de Marolles
Frère Pierre de Marolles est frère dominicain de la province de Suisse. Après des études à Fribourg, En 2021, il poursuit un doctorat à Louvain-la-Neuve, où il continue de travailler sur l'Apocalypse.
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