9. Apocalypse 17 à 21 : happy end !
Nous voilà enfin arrivés à la fin !
Voix off : le Jugement dernier ! L’humanité coupée en deux ! L’ange avec sa balance ! Les tourments de l’enfer…
Eh non ! Désolé de vous décevoir ! Toutes ces images ne doivent pas grand-chose à l’Apocalypse. Mais alors que raconte la fin de l’Apocalypse ?
Les deux cités
Comme au début du livre, quand Jean passe de l’île de Patmos au ciel, un changement de décor marque clairement le début d’une nouvelle et dernière section. En effet, au début du chapitre 17, un ange vient trouver Jean pour l’emmener voir la ville de Babylone et puis revient le chercher au chapitre 21 pour l’emmener voir cette fois-ci la Jérusalem. La section finale de l’Apocalypse est donc marquée par l’opposition entre ces deux cités, nous y reviendrons. Plongeons donc une dernière fois dans le plan.
Le combat final
Entre deux, la présentation des deux cités, le combat final et le jugement, sont réglés en deux chapitres seulement ! Eh oui ! Je dis seulement car quand on y pense, c’est court sur un livre de 22 chapitres, réputé raconter la fin du monde…
C’est même encore pire que ça puisqu’en fait le combat final est réglé en à peine 3 versets ! Nous retrouvons en effet les deux bêtes, qui ont rassemblé leurs armées, prêtes à affronter un mystérieux cavalier blanc qui n’est pas sans rappeler le Fils d’homme apparu au début du livre, accompagné de sa propre armée ! Un combat fantastique nous est promis mais qui tient en 3 phrases :
« Et j’ai vu la Bête, les rois de la terre, et leurs armées, rassemblés pour faire la guerre au cavalier et à son armée. La Bête fut capturée, et avec elle le faux prophète (…). Ils furent jetés vivants, tous les deux, dans l’étang de feu embrasé de soufre. Les autres furent tués par le glaive du cavalier. » (Apocalypse 19, 19-21)
Il faut s’imaginer un film hollywoodien de 2 h où la bataille finale tant attendue serait finie en 2 min… On est presque tenté de dire « tout ça pour ça ! »
Le Jugement dernier
Et le jugement dernier n’a pas de quoi nous consoler : 5 versets en tout et pour tout… qui se concentrent surtout sur le fait que tous les morts ressuscitent et que la mort elle-même est vaincue. Il est d’ailleurs intéressant de noter que les seuls, dont il soit vraiment précisé qu’ils seront « torturés jour et nuit pour les siècles des siècles » dans l’étang de feu, sont justement le dragon et les bêtes (Apocalypse 20, 10). Si le jugement dernier tient si peu de place, c’est que, pour l’Apocalypse, le jugement a déjà eu lieu, avant même la bataille finale, dans l’effondrement de Babylone !
La ruine de Babylone
Laissons donc là notre survol et plongeons dans le texte. En effet, la grande cité, Babylone, que Jean découvre au chapitre 17, n’est présentée dans sa puissance que pour nous annoncer aussitôt sa ruine ! C’est la grande révélation de l’Apocalypse : le mal s’effondre de lui-même car sa force n’est qu’illusion !
La fin de l’Apocalypse présente donc bien un jugement où le bien est définitivement séparé du mal. Elle le fait en présentant de façon tout à fait symétrique les deux cités qui sont, selon une image classique dans la Bible, présentées comme deux femmes.
A la Babylone, la grande prostituée enivrée du sang des martyrs, est opposée la Jérusalem, belle comme une épouse parée pour des noces. Elles sont toutes les deux présentées à Jean par un même ange qui le transporte et le guide dans sa visite. Les deux sont liées aux protagonistes du combat final puisque Babylone chevauche la bête, alors que Jérusalem est l’épouse de l’agneau.
Du jardin à la ville
Il convient toutefois de s’arrêter sur un fait qui peut paraît évident mais qui ne l’est pas : à savoir le fait qu’il s’agisse justement de deux villes ! La ville est en effet une réalité ambiguë dans la Bible : Depuis la première ville dont le bâtisseur n’est autre que Caïn, le premier meurtrier, jusqu’aux grandes villes-empires comme Babylone ou Rome, en passant par la célèbre tour de Babel, qui avant d’être une tour est une ville, ou par les grandes villes de l’esclavage en Égypte : les villes sont plutôt synonymes dans les Écritures de violence et d’oppression. Leur destruction est donc un symbole de libération et de paix ! Mais il y a Jérusalem, la ville conquise par David que Dieu a choisie « pour y faire reposer son nom », vers qui afflueront toutes les nations de la terre pour vivre enfin dans l’entente et la sécurité !
Dieu, au début de l’histoire des hommes leur avait offert un jardin pour y vivre avec lui. Mais les humains ont préféré construire des villes pour y habiter ! Ainsi à la fin de l’histoire, Dieu choisit donc de balayer ce que ces villes ont de violence et d’oppression mais il fait quand même descendre du ciel une ville pour vivre pour toujours avec les hommes !
La Jérusalem céleste
La Jérusalem céleste est donc en elle-même un symbole de cette rédemption, de ce rachat, puisqu’elle est en même temps la ville des hommes, œuvre de mains humaines, et un cadeau de Dieu venu du ciel ! On y retrouve d’ailleurs tout ce que l’homme avait perdu du jardin des origines, car au milieu de la ville coule le fleuve d’eau vive et l’arbre de vie y offre son fruit !
Voilà la grande vision finale sur laquelle se conclut l’Apocalypse :
« Voici la demeure de Dieu avec les hommes ; il demeurera avec eux, et ils seront ses peuples, et lui-même, Dieu avec eux, sera leur Dieu. Il essuiera toute larme de leurs yeux, et la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur : ce qui était en premier s’en est allé. » (Apocalypse 21, 3-4)
frère Pierre de Marolles
Frère Pierre de Marolles est frère dominicain de la province de Suisse. Après des études à Fribourg, En 2021, il poursuit un doctorat à Louvain-la-Neuve, où il continue de travailler sur l'Apocalypse.
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