5. L’avarice
L’Avare, de Molière. Il ne pense qu’à son argent. Pas besoin d’être théologien pour le comprendre : chez l’avare, l’argent ne fait pas le bonheur ! Dans cette vidéo, je vais composer ma définition de l’avarice couche après couche. Voici une première définition.
1ère définition : L’avarice, c’est une attitude de l’Homme qui consiste à désirer les richesses pour elles-mêmes.
L’avare oublie tout ce à quoi une chose peut servir pour ne voir de valeur que dans la chose elle-même.
VOIX OFF : Alors si j’économise de l’argent, je suis avare ?
Non ! Ce n’est pas un mal de gérer sainement ses finances. Le problème c’est lorsque la possession devient une fin en soi. Il ne s’agit pas d’avoir peur de l’argent. Mais si vous amassez des richesses, n’y mettez pas votre cœur.
VOIX OFF : Alors l’avare c’est celui qui ne veut pas donner ?
Ce n’est qu’une conséquence d’un mal plus profond. L’avare est obnubilé par sa richesse matérielle. L’avare, qui ne veut pas donner, et le cupide qui veut toujours plus, sont deux versants du même mal. Je comprends donc avarice et cupidité comme des synonymes. Vouloir gagner toujours plus et vouloir garder à tout prix sont deux versants du même problème.
2ème définition : L’avarice, c’est un désir démesuré de richesse.
A la fin, l’argent prend pour l’avare la place de Dieu, l’argent devient une idole. C’est ce qui fait dire à saint Paul en Colossiens 3, 5 :
« faites mourir en vous […] cette soif de posséder qui est une idolâtrie ».
3ème définition : L’avarice est une idolâtrie
Prenez la parabole de l’agriculteur insensé (Luc 12, 13-21). Il croit trouver la sécurité pour de longues années en construisant de plus grands greniers.
« Mais Dieu lui dit : “Tu es fou : cette nuit même, on va te redemander ta vie. Et ce que tu auras accumulé, qui l’aura ?” »
Cet avare croit trouver la sécurité dans la possession et l’accumulation de choses. C’est un autre aspect de l’avarice : une attitude qui refuse de dépendre de Dieu. C’est donc ma 4ème couche :
4ème définition : l’avarice est une attitude qui refuse de dépendre de Dieu
Quels sont les symptômes de l’avarice ?
VOIX OFF : On n’est pas avare que de son argent ?
Exactement, l’avarice peut être plus subtile. Prenons l’exemple donné par Lewis, dans son petit livre spirituel et humoristique « La Tactique du diable ». Il remarque que ce dont nous sommes souvent avares sans nous en rendre compte, c’est de notre… temps ! Il met en scène une lettre du diable à son neveu, un tentateur débutant. « Donne-lui, au début de chaque journée, la certitude d’être le légitime propriétaire de vingt-quatre heures entières ». Or, c’est complètement absurde : « l’Homme est absolument incapable de créer [...] la moindre parcelle du temps qui lui est accordé, tout entier, comme un cadeau ; il pourrait aussi bien se considérer comme le propriétaire du soleil et de la lune ».
Dernière couche de peinture : L’avarice, c’est tout ce qui s’oppose à la « pauvreté de cœur », savoir que rien ne m’appartient. Ultimement, je finirai ma vie, et les biens de ce monde serviront à d’autres.
Quelques conséquences de l’avarice.
Comme tous les péchés capitaux, elle ouvre la voie à d’autres troubles et péchés. En 1 Timothée 6, 9, Paul écrit ainsi :
« la racine de tous les maux, c’est l’amour de l’argent. Pour s’y être livrés, certains se sont égarés loin de la foi et se sont transpercé l’âme de tourments sans nombre ».
1er type de conséquence, d’abord, l’avarice ferme le cœur au prochain dans le besoin. Elle détruit les liens familiaux, sociaux : voyez l’Avare, de Molière, qui veut forcer le mariage de ses enfants, se méfie de tout le monde, et ne s’attache plus aux gens que par intérêt.
2e type de conséquence, l’avarice peut avoir des conséquences sociales, à grande échelle. Dans sa Somme de Théologie, saint Thomas d’Aquin nous montre que l’avarice est un manquement à la justice (II-II Q.118, art. 3), parce qu’on acquiert et on conserve des richesses au détriment des autres personnes. C’est injuste !
L’avarice peut ainsi avoir des conséquences désastreuses sur l’économie et la rendre malsaine. Certains vont chercher à accumuler le plus possible, sans utiliser ces richesses accumulées pour produire de nouveaux biens et services.
Autre exemple de conséquences à grande échelle, en écologie. Avoir sous la main des ressources infinies, c’est ce que désire l’avare. Jamais l’avare ne se contente de consommer ce qui lui suffit, de vivre dans le présent, de contempler le monde. Pour nous chrétiens, vivre dans un environnement aux ressources limitées n’est pas une malédiction. C’est une pédagogie pour apprendre à rester dans la mesure, à vivre pleinement de ce que nous avons maintenant.
Qu’est-ce qu’on rate ? La pauvreté de cœur.
Dans Matthieu 5, 3 nous lisons
« Heureux les pauvres de cœur, car le Royaume des Cieux est à eux ».
Dieu est le seul qui puisse combler le désir de nos cœurs. Jésus, la source d’eau vive, disait à Ste Catherine de Sienne « Fais-toi capacité, je me ferai torrent ».
Prenez l’exemple de pauvres de cœur, comme St François, ou Mère Teresa et tant d’autres. N’ont-ils pas trouvé les vraies richesses de ce monde ? Le pauvre de cœur accepte ce que la vie lui offre comme un cadeau. Mais il ne s’y accroche pas non plus, car il sait qu’il est fait pour Dieu.
Qu’est-ce qu’on fait pour lutter contre l’avarice ?
Dans tous les cas, c’est un péché qui nous isole et nous rend la dépendance aux autres insupportable. Il faut donc réapprendre à goûter ce que Dieu nous donne, à Lui faire confiance, et à dépendre des autres.
C’est une démarche spirituelle, peut-être psychologique… voilà quelques idées concrètes pour les mettre en œuvre.
C’est aussi une démarche concrète.
Trois conseils pour rechercher la pauvreté de cœur : générosité, sobriété, confiance.
Sobriété : pour savoir savourer ce qu’on a maintenant
Générosité : ouvrir les yeux sur le monde, les injustices, les pauvres. Et ouvrir ses mains pour donner.
Confiance : La vie comporte toujours une part d’incertitude, mais faisons confiance en Dieu. L’évangile en Matthieu 6, 26-27 nous encourage :
« Regardez les oiseaux du ciel : ils ne font ni semailles ni moisson, ils n’amassent pas dans des greniers, et votre Père céleste les nourrit. Vous-mêmes, ne valez- vous pas beaucoup plus qu’eux ? Qui d’entre vous, en se faisant du souci, peut ajouter une coudée à la longueur de sa vie ? »
frère Alban Vallette d'Osia
En 2020, frère Alban est frère dominicain, ayant fait des vœux temporaires.
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