10. Marie, la femme de l’Apocalypse ?
« Nous te saluons, Ô toi Notre Dame,
Marie, vierge sainte que drape le soleil.
Couronnée d'étoiles, la lune est sous tes pas.
En toi nous est donnée l'aurore du salut. »
Noir – Tiens, j’aime aussi ce chant. Je l’ai souvent en tête moi aussi !
Blanc – Tu as remarqué que les paroles viennent de l’Apocalypse : « que drape le soleil, couronnée d’étoile, la lune sous tes pas » ça fait référence à la femme dans le ciel au chapitre 12.
Noir – Ah oui !... Dommage que ce soit une erreur, puisque l’Apocalypse ne parle pas de la Vierge Marie…
Blanc – Quoi ??
« Un grand signe apparut dans le ciel : une Femme, ayant le soleil pour manteau, la lune sous les pieds, et sur la tête une couronne de douze étoiles. Elle était enceinte, elle criait, dans le travail et les douleurs de l’enfantement. (…). Or, elle mit au monde un fils, un enfant mâle, celui qui sera le berger de toutes les nations » (Apocalypse 12, 1-2.5)
Blanc – Qu’est-ce qu’il te faut de plus… L’enfant de la femme qui devient le berger de toutes les nations : c‘est clairement Jésus. Alors à moins que tu n’aies un scoop à me révéler, la mère de Jésus c’est la Vierge Marie !
Noir – Alors il faut quand même remettre le passage dans son contexte. Marie n’a pas accouché au ciel mais dans une étable et l’Apocalypse n’est pas un évangile nous racontant la naissance de Jésus. Si tu lis, tu verras que l’enfant est aussitôt enlevé au ciel pendant que la femme est pourchassée par le dragon sur la terre. Alors à moins que l’Apocalypse ne fasse un raccourci en passant directement de Noël à l’Ascension sans passer par Pâques, ce n’est pas de l’accouchement de Marie dont il s’agit.
Blanc – Alors d’après toi qui sont cette femme et son enfant ?
Noir – Le dictionnaire des images de l’Apocalypse …
Blanc – C’est Ancien Testament. Oui, je sais, vas-y !
Noir – Dans l’Ancien Testament, c’est le peuple de Dieu ou plus précisément la ville de Jérusalem qui est représentée comme une femme. D’ailleurs l’Apocalypse reprend cette image en présentant à la fin du livre la Jérusalem céleste mais aussi la Babylone, comme des femmes. De plus, plusieurs prophètes (surtout Isaïe et Jérémie) annoncèrent que le jour de Dieu tomberait sur le peuple comme les douleurs de l’enfantement, car il serait soudain et douloureux mais que par lui commenceraient les temps nouveaux inaugurés par la venue du Messie.
Blanc – Donc tu admets que l’enfant c’est le Christ !
Noir – Oui, cependant la scène ne fait pas seulement référence au moment de sa naissance mais à toute sa vie. La femme qui enfante c’est donc le peuple de Dieu : qui a souffert jusqu’à sa venue, qui s’est réjouie de voir son jour, mais doit encore après cela affronter ici-bas l’adversité du dragon.
Blanc – La femme est donc une figure de l’Église.
Noir – Oui. Et certains commentateurs anciens faisaient même remarquer qu’elle était donc une figure de chaque chrétien qui doit spirituellement donner naissance à Jésus dans sa vie !
Blanc – Mais du coup cela vaut particulièrement pour Marie, qui par son « oui » donné à l’ange, a donné naissance à Jésus non seulement physiquement mais aussi spirituellement. Elle est aussi un peu le modèle de tout croyant et donc le modèle de l’Église. Donc la femme d’Apocalypse 12 c’est quand même un peu la Vierge Marie !
Noir – Oui, on pourrait dire que le texte de l’Apocalypse ne vise pas directement la Vierge Marie, mais qu’il s’applique particulièrement bien à elle !
frère Pierre de Marolles
Frère Pierre de Marolles est frère dominicain de la province de Suisse. Après des études à Fribourg, En 2021, il poursuit un doctorat à Louvain-la-Neuve, où il continue de travailler sur l'Apocalypse.
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