8. Prier les morts ?
La vie après la mort interroge. Que cela vienne de chrétiens ou non, j'ai souvent entendu des témoignages d'hommes et de femmes qui s'adressent à un défunt pour lui demander un petit coup de main. Souvent, c'est une grand-mère pieuse, un proche que l'on aimait particulièrement. Cela m'arrive aussi parfois et, lors des funérailles, il n'est pas rare qu'un des témoignages personnels s'adresse directement au défunt.
Jésus aussi a parlé à des personnes décédées. Lors de la Transfiguration il s'entretient avec Moïse et Élie. Un peu plus tard dans l'Evangile de Marc (Marc 12, 26), Jésus affirme que le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob est le Dieu des vivants et non des morts. Cela signifie que pour Jésus, Abraham, Isaac et Jacob sont vivants auprès de Dieu. Parler à une personne qui est morte est un geste qui témoigne d'une foi en une vie au-delà de la mort, ce qui est bon.
Cependant cette attitude comporte deux risques. Le premier serait que notre conversation avec un mort nous empêche de faire notre deuil. L'amour que nous avons pour une personne décédée demeure, mais la relation s'est transformée, elle est devenue autre. Nous devons accepter de laisser cette personne être en Dieu. Le deuxième risque serait d'entrer dans une représentation spectrale où les morts circulent dans notre monde de façon invisible. C'est pourquoi notre prière doit nous conduire à nous adresser principalement au Père, comme le fait Jésus. Il est bon que notre prière faite directement à une personne défunte devienne une étape pour nous tourner vers le Père, animés de l'espérance que nos morts sont avec Lui et que nous les retrouverons un jour.
Nous tourner vers le Père ne nous empêche pas de prier pour les morts. Au contraire ! Nous demandons au Père qu'il les accueille dans sa lumière, dans son amour. C'est même un beau témoignage d'amour. Les chrétiens prient pour les morts depuis le début de l’Église et même les juifs avant les chrétiens. Dans l'Ancien Testament, Judas Maccabée fait faire pour les soldats morts, qui avaient péché, un sacrifice pour qu'ils soient pardonnés. Et, aujourd'hui, de nombreux chrétiens demandent de célébrer des messes avec une intention de prière particulière pour des personnes décédées.
Dans la tradition catholique, nous parlons de purgatoire, c'est-à-dire d'une purification au moment de la mort, comme au travers d’un feu selon les mots de saint Paul. Il ne s'agit pas d'une salle d'attente car le temps et l'espace n'existent plus en Dieu. Quand nous prions pour les morts, nous prions pour leur naissance en Dieu qui, éventuellement, doit passer par une sorte de feu.
Terminons par ce que nous mentionnons dans notre crédo, la communion des saints. Nous croyons que les saints, connus et inconnus, continuent à prier pour nous au ciel, à commencer par Marie, la mère de Jésus. Et nous pouvons quand nous le voulons solliciter leur prière. Mais ce n'est pas seulement cela la communion des saints. Elle est beaucoup plus large. Quand Saint Paul parle des baptisés, il les appelle les saints. Ainsi, la communion des saints désigne tous ceux qui se tournent vers Dieu en vérité. Une communion ou une solidarité existe entre nous. Elle permet au bien qui est fait par l'un de profiter à tous. Une sorte de réseau social invisible où le meilleurs de chacun est partagé pour le salut des âmes et le bonheur de tous. La communion des saints irrigue notre vie de foi, sans que nous nous en rendions compte. Lorsque nous demandons la prière de Marie ou la prière d'autres saints, il est bon que ce soit une étape pour nous tourner vers le Père, Lui qui, au final, reçoit toutes les prières. Nous retrouvons ainsi les premiers mots de l'unique prière enseignée par Jésus : Notre Père.
frère Benoit Ente
Frère Benoît Ente est dominicain à Lille, dans la maison filiale du couvent, 60 rue de Condé, dans le quartier de Wazemme. Il s'intéresse au cinéma et reprend des études après avoir été responsable de Carême dans la Ville pendant plusieurs années.
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